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Peindre sur tout, peindre surtout

Peinture sur pommes, poires, cerises en résine Sur galets en pâte de verre Sur carnets de notes et de croquis A5 et A6 Sur des ardoises de formats 15x10 ou 15x15 cm. Peindre sur tous les supports, peindre sur tout, peindre surtout... Est-ce de l'art ? Qu'est-ce que l'art ? Cette question, tout artiste se la pose forcément en amont ou en aval de son geste créateur, de ses actes d’individu créatif. Il semble que la réponse soit comme l’art lui-même, multiple, indéfinissable, indéfini, infini; c1 Peinture sur pommes, poires, cerises en résine
Sur galets en pâte de verre
Sur carnets de notes et de croquis A5 et A6
Sur des ardoises de formats 15x10 ou 15x15 cm.

Peindre sur tous les supports, peindre sur tout, peindre surtout...
Est-ce de l'art ? Qu'est-ce que l'art ?

Cette question, tout artiste se la pose forcément en amont ou en aval de son geste créateur, de ses actes d’individu créatif. Il semble que la réponse soit comme l’art lui-même, multiple, indéfinissable, indéfini, infini; complexe, contradictoire et sans limites. Et cette réponse sera bien entendu différente pour un artiste, ce faiseur d’art, dont la création lui sert à dire sur soi, sur son époque, sur ses rêves, sur l’autre, sur sa relation au monde, sur ses peurs, et ce sont, cette réalisation, ce positionnement, ces choix qui deviennent art. L’art a-t-il été inventé par les hommes parce que la vie en elle-même, ou telle qu’elle se présentait par essence, organiquement, ne suffisait pas ? Avait-on besoin de s’inventer une forme de paradis sur terre ? L’homme a-t-il dans ses gênes, dans sa physiologie, dans ses neurones et ses atomes, l’art en présence ? Inné ? Acquis ? Naturel ou culturel ? Qu’est-ce qui a poussé un jour nos ancêtres à créer, à « faire « de l’art, à faire œuvre, à entrer en création, à rendre visible l’invisible, à dire l’indicible ? Qui - ou quoi ? - décide qu’une création humaine est une œuvre d’art ?

Des questions que je me pose évidemment en tant qu’artiste. Vivre l’art, c’est mettre en œuvre l’instinct qui pousse à créer, à chercher au cœur de soi et de son âme, le vrai, le juste, le rire, l’approbation, la sérénité, pour ne faire qu’un avec soi. Une équation subtile qui m’entraîne vers un espace ouvert, illimité, l’univers tout entier, une forme d’idéal d’espace et de temps. Etre un artiste, c’est travailler sur l’affirmation d’une personnalité singulière, et prendre pas à pas conscience de la route que l’on doit emprunter, nourrie d’expériences sensibles, sans perdre de vue l’ici et le maintenant. Trouver son point d’ancrage, s’y amarrer solidement, avoir conscience dans chacun de ses gestes, de vivre, d’exister, cheviller ses principes au corps de toute toile et peindre pour vivre, pour être et appréhender tous les instants. Se servir de tous ses sens, de toutes ses émotions, l’œil qui guide et qui choisit, enregistre et transmet comme un allié utile. Il ouvre cette porte magique d’un monde onirique, où le réel et l’imaginaire ne font qu’un, où tout se rejoint dans un cadre unique : celui du tableau.
Une once de réalisme, celui qui bâtit, qui nous fait croître et tenir debout, non comme des statues, mais comme des coureurs de fond et de sens, à la poursuite d’une idée ou d’un idéal, du natif à l’esthétique. L’expérience artistique, c’est vivre en conscience, celle de nos anciens, nos aïeuls, nos grands ancêtres, c’est accepter leur présence éternelle qui nous donne des ailes pour poursuivre notre rêve d’îles lointaines et continuer leur chemin de sagesse, celui de nos aînés, de nos alliés. Pour sereinement peindre la vie, et un jour, passer le gué.
L’art, en dehors de la production d’œuvres, peut se définir également par sa vocation, ses fonctions : perçu comme un « davantage de vivre », il poétise et enchante la vie, mais aussi il transmet un message, il transcende les émotions, il irradie en dehors de la raison, il éduque la rétine par le sentiment, par les sens, il est mémoire. Je le vis au quotidien comme un vecteur permettant d’accéder à ses rêves, de réaliser les rêves que l’on porte en soi et en les transformant en art, il élève, affirme, ouvre les voies, les possibles, il abat les certitudes. Il ne punit pas, il n’est ni culpabilisant, ni répressif, il ne se veut jamais censeur, mais il est souvent censuré ou réprimé quand il apparaît trop en avance. Parce qu’il est fondateur et novateur, il est toujours en avance…
L’art est au-delà du terrestre, au-delà du temps, de l’espace. ; peut-être ainsi permet-il à ceux qui peuvent y accéder, de s’éloigner de la peur du futur, de la peur de soi et de l’autre, de la peur de la mort. L’art, cette pratique humaine, propre à l’homme, qui fait appel à nos sens, à notre vécu, à l’histoire, à l’esthétique, à la philosophie, à la pensée, à l’intellect, à l’intuition, à l’instinct, aux émotions, est espoir ; l’art, nous accompagne, que l’on soit créatif ou parce qu’on le fréquente en tant que spectateur, que lecteur, que visiteur, qu’ « émerveillé et ré-enchanté » ; aimer l’art, c’est aimer vivre, savoir être, c’est l’art d’être, l’art de vivre, l’art d’être vivant. L’art est-il naturel ? Notre capacité à créer et à nous émerveiller ne ferait-elle pas partie de notre patrimoine génétique ?
Et acte créateur après acte créateur, je peux sans doute proposer un semblant de réponse : l’art sait mixer les temps, unir les sentiments aux couleurs, mêler les différences. Etre un artiste, c’est aussi transformer la poussière en matière vive et dans un pot de toutes les couleurs, faire naître dans son dessin, le secret, le tendre, le subtil, le puissant, les retrouvailles intemporelles, enfin renouées dans le destin de toute vie, gravées dans le dessein de sa vie. En quête d’équilibre et d’harmonie, d’un style, percer son secret action après action, pensée après pensée, idée après idée, et accéder à ce rêve crédible et réalisé ; créer. Un geste simple pour accéder à la justesse de l’expression, des images tendres et drôles du passé pour agrémenter le souvenir, une stature posée, campée fermement, une expression sincère travaillée sans fioritures. Une cérébralité sans doute complexe, faite de surgissement de l’inconscient et d’un travail en théories, la nature espiègle et facétieuse transmise par des gènes amusés. Un sens pratique aiguisé, une capacité à dénouer, l’instinct en avant, l’invention comme moteur. Alchimie des idées et des sentiments au service d’une nature vaillante, d’un caractère travailleur.
Tout cela concourt à la composition de scènes pittoresques, faites de mille rencontres, de mille voyages, contenus dans les mille vies au destin aventureux d’un sang qui brûle et flamboie, qui fait battre le cœur solide, vibrer l’âme nette et sobre de vies riches.
Une peinture puissante confectionnée comme on rêve, de bribes et de parcelles, de souvenirs et de réminiscences, de scènes, de sens, d’images et de sentiments. Trouver l’énigme, des indices de sa résolution avec les yeux qui voient, les atomes qui, unis, réunis, cheminent, des bras pour planter, deux cerveaux pour le spiritualisé et le conceptualisé. Gagner le temps, rendre les couleurs et les traits, humains, naviguer au cœur de son histoire. Elle n’est pas faite pour orner cette peinture, pas seulement, mais elle donne des ailes, de la pierre à bâtir, des outils pour cultiver, des champs à voir fleurir.
Et le nez sous la lune, on contemple le spectacle ; celui qui nous permet d’y croire, celui qui nous permet de dire encore mieux ; et c’est sans doute cela, l’art…


Muriel Cayet
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